Durant l’été 1996, un jeu sorti de nulle part nommé Cool Boarders avait su capturer l’air du temps en offrant une nouvelle expérience vidéoludique idéale pour une jeunesse accro aux sports extrêmes, aux capuches Quiksilver et aux baggies Carhartt. Malgré un accueil critique mitigé, le jeu avait fait un carton, lançant une vague de concurrents sur toutes les bécanes de l’époque pendant quelques années.
Sur Saturn, le meilleur jeu du genre fut Steep Slope Sliders (1997), développé on ne sait trop pourquoi par Cave (le Cave de Dodonpachi) et édité par Victor Interactive au Japon, avant que Sega n’en reprenne les commandes pour l’étranger. Beaucoup plus souple et propice aux expérimentations que Cool Boarders (et globalement un bien meilleur jeu), Steep Slope Sliders préfigurait le tournant « expérimente et invente tes combos » pris plus amplement par les jeux de sports extrêmes avec Tony Hawk quelques années plus tard.
J’en ai déjà parlé sur Boulette (dans l’ancien temps) mais Steep Slope Sliders s’était tellement fait remarquer à l’époque qu’il fait partie des rares jeux vidéo à avoir connu un voyage à rebours vers l’arcade, Capcom décidant de le porter sur ST-V avec l’aide de Cave en 1998.
Mais contrairement aux quelques autres titres Saturn devenus ensuite des jeux ST-V tel que Hanagumi Taisen Columns, et contrairement à Battle Arena Tōshinden 2 sur PlayStation que Capcom avait également extirpé du marché consumer pour en faire un jeu d’arcade, l’adaptation de Steep Slope Sliders est un jeu assez distinct de l’original.
En premier lieu, la version Saturn comptait énormément sur les boutons L et R de la manette. À la place, la version Capcom ne compte que sur deux boutons, histoire de pouvoir être installée sur un maximum de bornes. On pourrait croire que les contrôles s’en retrouvent restreints, mais cette économie de moyens a poussé Cave dans ses retranchements d’inventivité et d’efficacité.
Par exemple, sur Saturn, il y avait un bouton pour sauter et un bouton pour le grab. Sur ST-V, le même bouton sert contextuellement aux deux actions, considérant assez justement qu’on est obligé d’avoir sauté pour faire un grab. Quant à l’autre bouton, il remplace un peu tous les autres, permettant à la fois les drifts sur la poudreuse et les rotations (en conjugaison avec le stick) une fois en l’air. Étonnament, ça fonctionne super bien et le jeu est presque aussi souple que l’original.
L’autre principale influence de Capcom se retrouve dans la présentation du jeu, bien plus tape-à-l’œil. Les confirmations de tricks sont placardés à l’ecran, avec d’ailleurs des objectifs de combos bien plus violents que sur Saturn, et le jeu se dote d’un véritable écran de sélection de sept personnages distincts autant dans leur personnalité visuelle que dans leurs compétences, sur le modèle d’un jeu de baston. C’est une toute autre ambiance que le chill assumé de la version Saturn.
Évidemment, il est impossible de choisir son domaine de glisse, les stages du jeu (qui me semble être exactement les mêmes que sur Saturn) devant se parcourir à la suite sous la restriction d’un chrono de plus en plus impitoyable.
Il se trouve que la chaine Replay Burners a décidé de jeter son devolu hebdomadaire sur cette version arcade de Steep Slope Sliders, histoire de profiter de son Attract Mode qui montre tout ce qu’on peut faire avec un stick et deux boutons, puis d’une partie complète (à haut niveau) jusqu’au dernier niveau caché. Malheureusement pour Capcom, 1080° Snowboarding est sorti entretemps (février 1998) et a filé un sacré coup de vieux au jeu de Cave, au minimum sur le plan visuel mais aussi au niveau du réalisme des sensations de glisse, notamment grâce au stick analogique de la N64.
Coïncidence des destins croisés de l’industrie, 1999 verra les sorties d’une suite à Steep Slope Sliders… Mais sur PlayStation (Tricky Sliders chez Capcom), et d’une suite à Cool Boarders… Mais sur une console Sega (Cool Boarders Burrrn! sur Dreamcast chez UEP). Malheureusement pour Sega, je dirais que c’est Capcom qui s’en est le mieux sorti dans l’affaire. D’ailleurs pour l’anecdote (peu connue ?), Tricky Sliders accueille Leon, Claire et un zombie de Resident Evil 2 / Biohazard 2 dans ses persos cachés.