Non, je comprends Boulette, tout le monde est déjà bien trop occupé avec les préparations pour le 25ème anniversaire de Dragon Force lundi prochain, priorité aux choses importantes de la vie.
Note que Rhythm Tengoku fêtera lui seulement ses 15 ans, le 3 août prochain. C’est le tout dernier jeu GBA sorti par Nintendo au Japon, une semaine après la série des Bit Generations (et en pleine folie DS Lite / Brain Training / New Super Mario Bros.).
Sacré festival pour cette année 2006, d’ailleurs après la sortie de la du Game Boy Micro un automne plus tôt, pour pivoter (au prix d’un succès commercial mitigé) la console vers un public hipster-cool urbain et nomade, avec des titres comme Yggdra Union (mars), Mother 3 (avril), Calciobit (mai), les sept Bit Generations (juillet), Rhythm Tengoku (août) et enfin FF5 (octobre) et FF6 (novembre), les deux derniers jeux de la console au Japon.
Pour fêter cet anniversaire (enfin je suppose), Kirgeez vient de sortir un TAS de Gradius Advance, alias Gradius Generation au Japon et Gradius Galaxies en Amérique-du-Nord. Je vous recommande au moins de mater la courte intro avant de lire ce qui va suivre.
Deux infos intéressantes à dénicher dans cette intro. On pourrait instinctivement penser qu’il s’agit comme d’habitude d’un portage d’un jeu Super Famicom (donc potentiellement Gradius III) mais pas du tout, c’est un nouvel épisode original qui faisait canoniquement suite à Gradius IV.
C’est donc un exemple assez ancien de suite développée sur une base technologique bien moins puissante – qu’on pourrait qualifier d’expérience volontairement rétro – que l’épisode précédent (façon Mega Man 9 ou, pour d’autres raisons, Dragon Quest IX). Depuis la sortie de Gradius V, toutefois, cet épisode a rétroactivement été relégué au rang de spin-off de console portable par Konami comme par les joueurs.
Plus intéressant encore, l’apparition du logo de Mobile21, le développeur relativement méconnu du jeu. Mobile21 était un studio de développement de Tokyo qui avait été créé conjointement par Nintendo et Konami en plein boom des ventes de machines et jeux Game Boy Color, menés par Pokémon et Yu-Gi-Oh.
Le studio avait été créé pour s’occuper de soutenir techniquement et développer ses propres jeux utilisant le Mobile System GB, un service éphémère de Nintendo (et exclusif au Japon) qui permettait de connecter un Game Boy Color ou un Game Boy Advance aux réseaux de téléphonie mobile balbutiants de l’époque via ce périphérique, le Mobile Adapter GB.
La vidéo ci-dessus semble assez bien expliquer le topo mais le service Mobile System GB n’a tenu qu’entre janvier 2001 et décembre 2002, son grand fait d’arme étant notamment sa compatibilité avec Pokémon Crystal pour accéder à des trucs exclusifs comme un donjon spécial, les premières bastons en ligne de la série et une newsletter mensuelle.
Symbole de l’investissement de Nintendo (et Konami) dans le service, deux jeux de lancement du Game Boy Advance étaient compatibles avec le Mobile System GB. Mais pas forcément ceux qu’on aurait instinctivement suspecté…
Napoleon, qui pour rappel est une exclusivité française en dehors du Japon, permettait d’accéder à différents types de challenges (Time Attack, Survival etc.) avec des batailles inédites, et un classement en ligne des meilleurs joueurs.
Play Novel Silent Hill, l’adaptation en sound novel (façon Kamaitachi no Yoru) du premier Silent Hill, offrait un scénario épisodique supplémentaire dont chaque nouveau chapitre devait être acheté séparément en DLC à sa sortie. Telltale n’a rien inventé.
Seulement deux autres jeux GBA – sortis dans les premiers mois de la console – utiliseront le service, symbole que le truc n’a jamais vraiment pris malgré son contenu exclusif. Comme expliqué dans la vidéo, Mario Kart Advance (version japonaise de Super Circuit) permettait d’accéder à des classements de Time Attack en ligne, télécharger des fantômes de développeurs et d’autres joueurs, et participer à des tournois multi asymétriques de Time Attack sur des circuits imposés. Mario Kart Wii n’a rien inventé.
C’est le dernier jeu GBA sorti à utiliser le service, mais pas le dernier jeu tout court puisque quelques logiciels GBC compatibles continueront de sortir, le dernier loustic de la bande étant finalement (sauf erreur) Hello Kitty no Happy House, un tout aussi adorable que futile logiciel de messagerie e-mail pour Game Boy Color sorti le 2 mars 2002. Gmail n’a rien inventé.
Revenons à nos brebis égarées de Mobile21. Je ne crois pas qu’on sache exactement sur quels titres Mobile System GB (et dans quelle capacité) Mobile21 a bossé, mais on leur connaît la paternité directe de trois jeux, tous sortis sur Game Boy Advance. C’est rigolo mais aucun d’entre eux n’utilise le Mobile System GB. You had one job!
Chez Konami, ils ont sorti ce Gradius ainsi que Tanbimusō Mein Liebe – oui c’est de l’allemand – un otome game gothique avec des persos conçus par Yuki Kaori (Angel Sanctuary) et dont la principale innovation était d’utiliser le câble Link GBA pour organiser des double dates entre copines, avec des événements scriptés spécifiques en fonction des deux persos masculins invités. Pour rappeler le contexte, Nintendo poussait énormément le câble Link au lancement de la console, sur ses propres titres comme ceux des éditeurs-tiers, permettant même de joindre une partie en multi sans posséder de cartouche sur certains jeux. La Nintendo DS n’a rien inventé.
C’est par contre chez Nintendo qu’on trouve le dernier jeu de Mobile21, Korokoro Puzzle Happy Panecchu!, sorti une semaine après Hello Kitty no Happy House, le 8 mars 2002. Je ne sais pas si c’est une coïncidence ou s’il s’agissait de régler tous les comptes et balayer les projets en cours avant la fin de l’année fiscale (31 mars). Dans tous les cas, Mobile21 a fermé dans la foulée, chaque staff et chaque IP repartant chez le parent le plus approprié. Konami sortira ensuite plusieurs épisodes de la série Mein Liebe sur PS2, par exemple.
Korokoro Puzzle Happy Panecchu! mérite néanmoins lui aussi son coup de projecteur puisque c’est le premier jeu GBA à utiliser une cartouche Ugoki Sensor, donc incluant un gyroscope pour détecter les mouvements (la Wii n’a rien inventé).
Je vous rajoute la boîte parce qu’elle tabasse et qu’on ne peut décemment rendre hommage à la ludothèque GBA sans parler de son adorable package design japonais lui aussi très proche du format Super Famicom mais standardisé avec une mise en page horizontale.
Je ne sais pas si le jeu utilise la même technologie que Koro Koro Kirby sorti sur GBC en 2000 mais le seul autre jeu GBA à utiliser ce format de cartouche sera Yoshi no Ban’yūinroku / Yoshi’s Universal Gravitation deux ans plus tard. Mawaru Made in Wario / WarioWare: Twisted! utilisant lui une technologie différente. Voici une dernière vidéo qui, en plus de faire le mariole avec un Game Cube et un Game Boy Player, montre à quoi ressemble la PCB de cette cartouche à la fin.
Mais histoire de conclure sur une dernière anecdote amusante et symbolique de la génération Game Boy Advance, Happy Panecchu a tout de même un dernier secret rigolo qui aura survécu à la fermeture de son développeur.
Si vous avez joué aux deux autres jeux à reconnaissance de mouvement cités plus haut, Yoshi ou Wario, vous savez qu’il proposent une option pour inverser le sens de la cartouche afin d’être compatible avec le Game Boy Advance SP, qui avait son port-cartouche à l’envers. Pratique aussi pour le port GBA sur Nintendo DS.
Ce n’est certainement pas le cas dans Happy Panecchu puisque le jeu est sorti quasiment un an avant le GBA SP (8 mars 2002 → 14 février 2003). Du coup, c’est la baise ? Non ! Car le site Internet officiel du jeu a été réactualisé début 2003 pour dévoiler qu’en allant dans les options, en laissant le curseur sur l’option「かたむきせってい」(réglage de la sensibilité du capteur de mouvement) et en appuyant alors sur ↑+L+R+B, le gyroscope est soudainement inversé.
Précaution extraordinaire ? Ou coup de billard à trois bandes d’un nouveau modèle prévu de longue date ? On n’aura pas le fin mot de l’histoire mais vous voyez bien que même le patch Next Gen n’a rien inventé.