(Content que cela vous plaise !)
09/30 Tout ce que vous n’aviez jamais eu besoin de savoir sur Airs Adventure
Il y a quelques jours, un petit compte Youtube a posté une longue vidéo pour résumer Airs Adventure. Il n’y a que deux réactions possibles à cette phrase : ❶ « c’est quoi, Airs Adventure ? » ou ❷ « quelle idée bizarre, qui irait se faire chier à expliquer un jeu aussi nul qu’Airs Adventure !? »
C’est donc un sujet parfait pour ce neuvième post. En 1995, les deux genres les plus populaires sur consoles au Japon étaient les jeux de combat et les jeux de rôle. Pour la baston, entre Virtua Fighter, les portages du CPS-II de Capcom et les portages Neo Geo, pas de problème pour Sega et sa console. Plus compliqué avec le RPG sans le soutien des mastodontes Square et Enix, fidèles à Nintendo.
Sega avait déjà commencé à se forger une petite réputation dans le RPG avec la Mega Drive et surtout le Mega CD, mais il en fallait plus pour convaincre le public Super Famicom de passer en masse sur Saturn. Dès l’été 1995, Sega s’est donc empressé de promettre un paquet de titres via la campagne promotionnelle Rōpure Ōkoku Sega Saturn (« Sega Saturn, le royaume du RPG ») centrée autour de trois sorties de l’été 1995 : RiglordSaga (Mystaria chez nous), Shining Wisdom et Magic Knight RayEarth.
Sous cette première livraison, on peut voir que Sega promet déjà d’autres titres pour la fin d’année. Dans l’ordre, de gauche à droite, il s’agit d’un spin-off exclusif de la série Shin Megami Tensei nommé Devil Summoner (qui sortira effectivement le 25 décembre), d’un mystérieux 3DCG Polygon RPG temporairement titré Sega Adventure (ça prendra à peine un an de plus), de l’Action RPG Guardian Heroes de Treasure (qui sortira finalement en janvier 1996), du Dark Savior de Climax (qui sortira finalement en août 1996) et du seul jeu un peu plus réalistement promis pour le printemps 1996, Tengai Makyō Gaiden: Dai-4 no Mukoshiroku (qui sortira finalement en janvier 1997, tant pis).
Sega Adventure, qui s’appellera finalement Airs Adventure, est donc lui sorti en décembre 1996 après un développement ressenti à l’époque comme interminable au fil des annonces de retards. Je parlais plus haut de la couverture médiatique modeste de Sakura Taisen ; on ne peut pas en dire autant d’Airs Adventure qui a reçu un paquet d’articles et de promo dans les livrets promotionnels de Sega. Le voici présenté début 1996 comme l’un des trois grands RPGs du printemps, avec Dragon Force et Dark Savior (qui devait alors sortir en mai).
Autant d’attention pour ce qu’on pourrait qualifier charitablement d’une « honorable daube » ; je ne vais pas tout divulgâcher mais la vidéo démontre relativement bien comment le jeu a maladroitement tenté d’innover dans la casualisation du RPG, en simplifiant grandement l’expérience pour la rendre accessible au plus grand nombre (dommage que l’histoire et les combats soient insipides) et en misant sur la technologie du futur avec, en fin de compte, à peu près le même procédé technique que FF7 (sans le budget, le bon goût et le talent de programmation de Squaresoft). Mais jugez plutôt par vous-mêmes !
Le jeu est surtout connu pour avoir été un four monumental, du genre vendu neuf dans les bacs à soldes ¥1000 dès le début de l’année 1997, un mois après sa sortie. Il me semble l’avoir acheté ¥10 en 2002. Tout cela est mérité, hein. Il n’y a pratiquement rien à sauver. Reste quand même un mystère à expliquer : pourquoi Sega y a cru ?
Airs Adventure est un jeu développé et édité par le très imaginativement nommé Game Studio, boîte fondée dès l’époque de la Famicom par Endō Masanobu, le créateur de Xevious et The Tower of Druaga chez Namco. Notez que, malgré ce pédigrée, l’échec n’est pas choquant ; Game Studio a eu dès ses débuts un rendement assez inégal avec quelques gros succès mais surtout pas mal de jeux connus pour leurs fausses bonnes idées. Sega faisait encore, à l’époque de la promo du jeu, grand cas du nom derrière la boîte.
On doit en fait le game design à Shibata Gabon, illustre inconnu à l’époque. C’est un iconoclaste du JV qui a ensuite conçu Doshin the Giant (mais en laissant heureusement le développement à un véritable game designer) et Ingot79 (un autre « honorable Kusoge » pour la PS2 sur le concept de prospection d’or). On doit le charadesign et globalement l’orientation artistique à Nagano Mamoru, un des grands noms du mechadesign des dessins animés de robots des années 80 (L-Gaim, Five Star Stories, Giant Gorg etc.). Il voulait probablement changer d’air avec cette aventure. La musique – sans doute l’aspect le plus réussi du jeu – provient de Saegusa Shigeaki, un des grands compositeurs japonais des années 80-90, notamment connu dans la culture populaire pour la musique de plusieurs séries Gundam. En récapitulant ces CV, je me dis que ces braves gens auraient peut-être dû faire un jeu de robots géants.
[Bonus tardif !] Bigre, je cherchais une autre speedrun et je tombe sur cette improbable Real Time Attack commentée d’Airs Adventure. Quelle chance vous avez.