Grindstone
Le jeu-phare des débuts de l’Apple Arcade (à l’insu d’Apple qui comptait sur des noms plus clinquants) est arrivé sur Switch dans le courant de l’année dernière et j’ai attendu début 2024, un peu pauvre en nouveaux puzzle games, pour m’y mettre. C’est une variation rigolote de Puzzle Quest ou Puzzle & Dragons → donc un jeu d’élimination de « gemmes » en « tour par tour » en trouvant les meilleurs « combinaisons » ; ici, cela se traduit par un gros viking qui peut éliminer les monstres sur son chemin tant qu’ils ont la même couleur, avec certains monstres spéciaux ou gemmes qui permettent ensuite d’enchaîner avec une autre couleur.
À chaque tour, il faut donc trouver le chemin le plus efficace en tenant compte ① du nombre d’ennemis qu’on veut buter ② de l’endroit où le viking va atterrir (y a-t’il un ennemi prêt à attaquer ou un piège à côté ?) ③ des cases (ennemis forts, obstacles ou trésor) qu’on ne peut franchir qu’après un certain combo et ④ certaines subtilités qu’on ne maîtrise qu’après quelques heures, notamment une récolte efficace de matériaux de craft, ou même une gestion plus efficace des combos : les gemmes qui facilitent les combos n’apparaissent qu’à certains paliers spécifiques et donc parfois ça ne sert « à rien » de faire 34 hits plutôt que 30 si cela fait gâcher une gemme qui pourrait servir au tour suivant.
Il y a plein de petits atours qui se dévoilent au fil de la progression : le craft qui permet de se construire un build plus performant grâce à des équipements ou des consommables, des sous-quêtes / succès qui débloquent d’autres trucs, des persos secondaires qui donnent des missions, etc. Toute la richesse et le shot d’endorphines permanent d’un bon jeu mobile moderne sont là, mais sans l’arnaque de la barre d’endurance ni la prédation des micro-transactions.
Les contrôles aux boutons font le taf (merci B pour un retour en arrière plus précis) et sont même plus pratiques que le tactile dans les menus, mais le cœur du jeu est tout de même bien plus agréable et intuitif en baladant l’index sur l’écran. Ce jeu marquera sans doute moins les esprits dans le carambolage ludique contemporain mais il aurait certainement pu devenir un grand classique de la Wii U ou de la Vita une génération plus tôt.
En tout cas, je comprends totalement l’addiction qui a pris les joueurs Apple à l’époque ; je n’ai pas été aussi accro à un jeu dans ce genre depuis Puzzle & Dragons Z sur 3DS, y compris – je l’avoue – quelques « une petite dernière » honteuses à trois heures du matin en pleine semaine de taf. J’avais réussi à lâcher le jeu fin janvier mais je suis retombé dedans pendant un récent voyage d’affaire, maldito… Heureusement que j’ai reçu ↓
Mario Vs. Donkey Kong
Si vous ne connaissez pas ce grand classique de la du Game Boy Advance, facile dans le top 10 de sa ludothèque à mon avis, il s’agit en fait du dernier épisode « canonique » du vénérable Donkey Kong – celui avec Pauline as Lady, Mario as Jumpman, les tonneaux et les barils. Plus exactement, c’est la suite conceptuelle du fameux Donkey Kong de la du Game Boy sorti en 1994, à la fois demake et suite directe du premier Donkey Kong. Comme dans cet autre chef d’œuvre, la grande particularité de Mario Vs. Donkey Kong est de fournir à Mario une palette de mouvements acrobatiques inégalée en 2D, qu’on retrouvera ensuite d’avantage dans Mario 64 et les autres Mario 3D.
Si jamais vous pensez « mais Mario Vs. Donkey Kong, c’était pas une espèce de Lemmings mignon/relou avec des Mini-Marios mécaniques ? », je comprends la confusion : les Mini-Marios sont bien apparus dans ce premier épisode mais la transformation de cette sous-série en Lemmings simplifié s’est effectuée à partir des suites sur Nintendo DS, pour mieux tirer partir de l’écran tactile. Ce premier épisode GBA, même ici retapé pour la Nintendo Switch, est lui resté un mélange arcade / puzzle / plate-formes dans le plus pur esprit Donkey Kong, avec des niveaux à peine plus larges qu’un écran.
Je l’ai dit plus haut, je pourrais le CapsLock : j’adore Mario Vs. Donkey Kong. Et ce remake est très réussi dans l’absolu : c’est une excellente remise à jour HD (mais toujours 60fps) de l’original, qui réussit à rester fidèle aux contrôles et à l’univers esthétique de l’original (encore un peu coincé dans l’esthétique CGI Silicon Graphics propre à beaucoup de jeux Nintendo 2D de cette époque) tout en leur donnant un vrai rafraîchissement nécessaire, et la bande-son est sans doute plus discutable mais la tournure « club de Jazz » de ces reprises lui donne une véritable personnalité sonore en marge des autres séries Mario.
Néanmoins, y rejouer (et le torcher : ça prend un week-end) m’a fait réaliser un truc. Trois trucs.
❶ À l’époque de Mario Vs. Donkey Kong sur GBA (sorti en mai 2004), sans même parler d’un « vrai » Donkey Kong, on n’avait pas eu de véritable nouveau Super Mario 2D depuis Yoshi’s Island (1995) voire Super Mario Land 2 (1992) – car Yoshi était un peu son propre trip. Donc retrouver un défi de plate-formes Super Mario faisait grave plaisir.
❷ Aujourd’hui, grâce à Internet et à la plus grande diffusion de l’information auprès des joueurs, beaucoup connaissent et reconnaissent le brio du Donkey Kong Game Boy. Mais à l’époque, c’était encore un jeu assez sous-estimé et un peu méjugé comme archaïque. En voir une suite débarquer soudainement sur une GBA plutôt habituée à émuler l’esprit Super Famicom avait été une excellente surprise.
❸ À cette époque, avant tout le bazar New Super Mario Bros. et l’uniformisation artistique qui a caractérisé l’IP Super Mario entre grosso modo 2006 et 2016, on était au contraire dans une période assez funky pour Super Mario : Paper Mario, Mario Sunshine à la plage, Mario fait du basket, Mario DDR, Goofy Mario dans Mario & Luigi RPG, etc. Pareil pour Donkey Kong : Donkey version Rareware/Country, Bura Bura Donkey, Donkey Konga… Ça faisait un bien fou de retrouver le « goût classique » de Super Mario et de Donkey Kong.
Bref, sans ❶❷❸ ce contexte, en 2024 et sur une Nintendo Switch qui jouit d’un catalogue Super Mario hallucinant en qualité comme en variété, avec par exemple un Super Mario Maker 2 qui propose à lui seul une tétrachiée de niveaux « puzzle arcade » dans le même esprit, ou un Captain Toad qui occupe lui aussi un peu le même terrain, je ne suis pas certain que le nouveau public de la Switch apprécie tout autant le brio de Mario Vs. Donkey Kong.
Reste, notamment avec l’ajout d’un mode deux joueurs inédit, ainsi que d’un nouveau mode simplifié pour les débutants, une approche sans doute moins vertigineuse et peut-être plus abordable du jeu de plate-formes 2D que le récent Mario Wonder (ou que Tropical Freeze du côté Donkey).