Astro Bot
Bouclé en une grosse quinzaine d’heures. Tout le monde fait la même remarque mais la filiation est évidente : c’est un excellent héritier de la formule Mario Galaxy, avec des niveaux plus proches structurellement de Super Mario Galaxy 2 spécifiquement. On retrouve cette filiation dans d’autres aspects comme les pouvoirs du perso ou le fait que la Dual Sense partage un haut-parleur avec la Wii Remote.
Je ne pense pas du tout que la démarche soit cynique ou volontaire de la part de Team Asobi mais cette citation de Galaxy me paraît un excellent choix commercial et critique puisqu’on arrive presque aux vingt ans de la Wii et qu’on va sans doute être submergés par la nostalgie de cette génération dans les années qui viennent.
Je me faisais d’ailleurs la remarque que, ce serait Nintendo qui aurait sorti un Super Mario Galaxy 3, j’aurais sans doute été assez critique quant au fait que « Mario en 2024 n’a rien de mieux à proposer qu’en 2010, vraiment !? » mais avec n’importe quel autre studio, ça me remplit de joie. Zarb.
★J’ai aimé :
Le rythme du jeu. Les animations. La physique. (Un peu trop de particules m’as-tu vu vers la fin.)
Une utilisation de la manette plus intelligente et fluide que dans Playroom, moins « attends regarde ! », et avec une meilleure utilisation du haut-parleur.
Je ne sais pas si c’est une question de contexte ou si Asobi a amélioré le feedback via ce même haut-parleur mais trouve aussi les passages scrounch scrounch plus convaincants. Mon top 3 : ① scrounch scrounch dans la neige, parfait ② scrounch scrounch avec les galets du dojo, je ne m’en lasse pas ③ … Honnêtement, j’ai du mal à compléter le podium mais je dirais scrounch scrounch du verre fragile. Pas sûr que ça compte comme un scrounch scrounch.
Très chouette, aussi, le détail « Mario » de la bande-son adaptative, notamment l’effet de sourdine quand on utilise le pouvoir de la souris. Ce passage-là, qui enchaîne si je me souviens bien avec l’excellent niveau du casino puis, pas loin, le niveau du onsen avec les petits singes, constitue sans doute le sommet du jeu.
L’onsen, c’est d’ailleurs le seul passage où je me suis dit « ah ! l’équipe de Mario doit (ou devrait) être deg’ de pas avoir exploité ce thème avant Astro ». À moins qu’on considère les petits singes au sommet du tableau 12 de Mario 64, mais l’atmosphère est sacrément différente. On se croirait plus dans un niveau de Super Mario Land ou de Super Mario Odyssey.
Je trouve d’ailleurs les niveaux globalement plus intéressants que ceux d’Astro’s Playroom, même quand ils explorent des thèmes similaires. J’aime aussi beaucoup le fait qu’il se « passe des trucs » sur la carte de la galaxie, qu’on puisse y trouver des niveaux secrets ou des petits challenges à réussir (une tendance qu’on retrouve aussi dans Mario Wonder).
La maison de la souris et le casino sont avant tout excellents parce qu’ils mettent en valeur des pouvoirs (la souris et le manipulateur de temps) qu’on a déjà vus dans d’autres jeux de plateforme mais sans doute jamais aussi bien exécutés. Je les place un cran au dessus de l’éléphant, qui repompe Mario Nuage de Galaxy 2 mais avec le twist très sympa de changer la nature de la plateforme en fonction du liquide absorbé. Voilà pour mon top 3 des pouvoirs.
Du reste, je trouve intéressant et pertinent que les « transformations » soient des bidules qui s’attachent à Astro. Ça rend la clef de lecture très limpide et intuitive, façon chapeaux de Mario ou Wario dans la série Super Mario Land, et ça justifie d’avantage le côté segmenté du level design que dans Mario Galaxy. À froid, cette segmentation autoritaire me pose malgré tout même le problème conceptuel que les fleurs de Mario Wonder : ça impose le passage au joueur, une école de game design en somme très passéiste quand le challenge actuel devrait être de laisser les joueurs choisir leurs outils et d’arriver à rendre le jeu fun quand même. Mais c’est un sacerdoce que j’imposerais d’avantage à Mario qu’à une franchise rookie comme Astro Bot.
Comme avec tous les jeux Team Asobi, je trouve surtout les Boss Fights excellents. Déjà, leur design « pulp manga » reste incroyable, à mi-chemin improbable entre les six premiers Rockman et la Susumu Matsushita Corp (à part le grand méchant dont je trouve le design un bon cran en dessous). Mais surtout, comme les pouvoirs de cet Astro Bot sont meilleurs que les jeux précédents, on a ici de meilleurs patterns que dans les Mario ou Sonic en 3D. À part le robot Sengoku dans Odyssey, qui semblait venir de Goemon, ce ne sont jamais des jeux qui brillent par leurs Boss Fights.
Dans la galerie des sbires, je ne me souviens plus quels monstres sont nouveaux vis à vis des précédents mais je n’ai jamais été convaincu par les petits robots lambdas et je trouve globalement les designs beaucoup plus réussis quand ils s’inspirent d’animaux, comme les crocodiles façon Wani Wani Panic ou le petit cochon. Ceci dit, mes deux sbires préférés sont deux variations du même concept plus abstrait : la bouboule qui lance son casque à pointe et la marmite de verre qui lance son couvercle. J’apprécie aussi les détails « à la Metal Slug » où l’on surprend les ennemis en train de vivre leur vie sans se préoccuper du joueur (on voit ça notamment dans le casino et le stage du génie).
Enfin, pour un jeu qui cite ou s’approprie tellement de trucs venus d’ailleurs, j’aime beaucoup qu’Astro Bot s’affirme dans son hub (ici la planète du crash site). Y a aucun autre jeu qui utilise vraiment son hub de cette façon ; ça se marie bien avec la collecte des Guest Bots, le gatcha donne un sens aux pièces collectées et c’est une excellente idée d’avoir « complété » les Guest Bots avec ses récompenses. C’est aussi le seul passage où ça sert à quelque chose que les Shine Gets du jeu soient des personnages sentients. Car…
★J’ai moins aimé :
Je trouve le concept des autres Astro Bots et Guest Bots à sauver vachement sous-exploité ; c’est d’autant plus dommage quand tu cites carrément le modèle Saru Getchu! dans un niveau-hommage. Le coup de génie de Saru Getchu!, c’est d’avoir mélangé l’étoile de Mario 64 avec les lapins de Mario 64. Dans Astro, on sauve des petits robots, parfois dans des situations rigolotes, mais le fait qu’ils soient sentients et autonomes n’a absolument aucune incidence sur leur comportement et très peu d’impact sur le challenge pour les récupérer. C’est quand même fort dommage. J’espère que leur prochain jeu sera un nouveau Saru Getchu!, donc.
D’ailleurs, j’ai pas mal changé d’avis sur l’utilisation des Guest Bots dans le jeu. Au début, je trouvais le choix des références complètement gratos : on passe son stage à rouler sur un tatou-boule, mais on débloque Toro le chat au lieu du singe de Monkey Ball ou du Prince de Katamari ? Gneh ? Malgré tout, j’excusais qu’Asobi mette la priorité sur la conception d’un bon niveau plutôt qu’un clin d’œil cohérent. Sauf que par la suite, plusieurs stages (le casino et le cimetière me reviennent en mémoire) ont des Guest Bots thématiques, sans parler des cinq stages-hommages. Du coup, je finis le jeu avec l’idée qu’il fallait se casser le cul et rendre tous les Guest Bots plus logiques, quitte à sacrifier les Guest Bots connus mais qui viennent d’univers trop nuls pour leur trouver une place. Adios Killzone.
Autre truc que je trouve sous-exploité : le jetpack laser d’Astro Bot. Depuis sa première apparition, c’est le jetpack de Mario Sunshine en plus rigolo. Finalement,il est très peu utilisé dans ce jeu, notamment dans les transformations d’Astro, et il a été calibré pour ne pas être « trop » efficace avec les streums. La hitbox du laser est super fine et les streums ont juste assez de résistance pour qu’il faille faire attention à ses sauts (notamment face aux monstres à pics). Moi j’dis : y a rien de plus fun que de cramer les sbires robotiques avec le laser d’Astro, RÀB de l’équilibre du jeu, rendez fastoche de tout bousiller avec le jetpack laser pour un gamin, il ne s’en lassera jamais et moi non plus.
À part ça, pas grand chose à redire, à part que j’aurais peut-être baissé l’accélération du tatou-boule de genre 5% ? Astro a une palette de mouvements beaucoup plus réduite que celle de Mario (a fortiori dans Mario Odyssey) mais je ne crois pas que ce soit gênant pour le petit robot.
Un truc que je ne comprends pas, et qui est possiblement subjectif ou dû à une trop grande habitude de Mario 3D, c’est que j’ai parfois eu beaucoup de mal à percevoir la profondeur dans Astro Bot, avec beaucoup de sauts dans le vide où je ne pigeais pas le rapport spatial entre Astro et la plateforme visée. Est-ce l’équipe d’Asobi qui se reposait trop sur la 3D stéréoscopique de Rescue Mission ? Y a-t’il une sauce magique dans Mario Odyssey, genre une gestion de focale, un angle de caméra ou une prise d’information inconsciente des tailles des objets qui rend les distances plus intuitives ? Est-ce juste ma faute = une question d’habitude avec Mario qui me trahit avec Astro ? Aucune idée, c’est purement une question de feeling et j’ai jamais réussi à le rendre intelligible.
Jusqu’ici, vous l’aviez compris : c’était vraiment du chipotage, ou bien des reproches plus théoriques sur des considérations de game design, plutôt que des trucs qui m’ont réellement embêté dans le jeu. Passons aux vrais reproches que j’ai envers Astro Bot.
① Le canard. Boudiou, c’est le fils de Totoki qui a désigné les niveaux du canard et on ne pouvait rien lui dire ? Le gouffre entre la nullité affligeante de ces niveaux où rien ne va et le reste d’Astro Bot me sidère ; j’ai l’impression de ne plus jouer au même jeu. On pige rien à cause du blou blou de flotte et des effets de lave devant, c’est de la branlette de particule pour la particule, y a zéro prise d’information visuelle constructive, les hexagones sur la lave sont trop petits du coup on hésite à avancer ou bien on tombe sans piger pourquoi, y a même pas de variation intéressante sur l’utilisation de l’objet (alors que c’est la grande force des meilleurs pouvoirs du jeu), bref ! C’est la misère à chaque fois. Quand je pense qu’on a trois putains de niveaux avec ce canard mais qu’on ne revoit jamais la souris…
② Je suis manifestement le seul être humain à le penser mais happy to die on that hill : pour un jeu d’un tel niveau de qualitié global, comparable avec le top du top de Nintendo, et venant d’une boîte avec un tel passif dans la musique que Sony Japan, je trouve la bande-son d’Astro Bot d’un quelconque à la frontière du stupéfiant. OK, la chanson d’Astro Bot (qui précède ce jeu) était un earworm marrant. D’accord, y a le remix de God of War avec le drop sur « Boy », okvu. Pour le reste, j’ai l’impression d’écouter un CD de librairie Nash – et j’ai beaucoup de respect pour les personnes qui composent pour Nash, attention – mais c’est du jazz fusion pop sans aucune personnalité et 24h après, c’est bien simple, je serais infoutu de vous siffler un seul passage du jeu.
③ Je vous rassure : j’ai tout fait tout fini et pourtant, moi non plus, je ne suis toujours pas 100% certain d’avoir pigé comment fonctionne le wall jump quand on court sur le mur.
C’est tout. Sinon, c’est top. Curieux d’avoir l’avis de @Lama s’il passe par ici puisque je le vois (ou son fils ?) constamment en ligne sur un jeu Mario.